Una temporada en el infierno

Juan Pedro Quiñonero

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París, Proust. El salón donde se cruzan los vivos y los muertos en el Parc Monceau

noviembre 12, 2011 JP Quiñonero 10 Comments

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RueVelasquez/Velázquez, 9 septiembre 2011. Foto JPQ.

En la Recherche, los salones de hoteles particulares y mansiones donde se celebra el esplendor y la gloria de sus propietarios también son la antesala donde los vivos se cruzan con los muertos camino del Hades.

[ .. ]

Frecuento, a diario, un viejo hotel particular, antigua propiedad de un extinguido linaje de banqueros egipcios, contemporáneos de los Guermantes proustianos, en la misma calle donde Proust escuchó por vez primera la Sonata de Vinteuil. Desaparecida la antigua sociedad y sus modos de vida, a la manera del nido vacío de una especie extinta de insectos carnívoros -que perecieron atraídos por la luz espectral del Infierno-, el lugar tiene siempre el carácter de cripta, mausoleo funerario, donde el narrador de la Recherche cruza los fantasmas que caminan hacia el Averno que es el tiempo histórico, invisibles entre las sombras que yo fotografío, inmortales en los Campos de Asfódelos de la palabra:

À ce moment le maître d’hôtel vint me dire que, le premier morceau étant terminé, je pouvais quitter la bibliothèque et entrer dans les salons.
[ .. ]
… je pensais [ .. ] à tous ceux qui n’étaient pas là parce qu’ils ne le pouvaient pas, que leur secrétaire, cherchant à donner l’illusion de leur survie, avait excusés par une de ces dépêches qu’on remettait de temps à autre à la princesse, à ces malades depuis des années mourants, qui ne se lèvent plus, ne bougent plus, et, même au milieu de l’assiduité frivole de visiteurs attirés par une curiosité de touristes ou une confiance de pèlerins, les yeux clos, tenant leur chapelet, rejetant à demi leur drap déjà mortuaire, sont pareils à des gisants que le mal a sculptés jusqu’au squelette dans une chair rigide et blanche comme le marbre, et étendus sur leur tombeau.
[ .. ]
Une dame sortit, car elle avait d’autres matinées et devait aller goûter avec deux reines. C’était cette grande cocotte du monde que j’avais connue autrefois, la princesse de Nassau. Mis à part le fait que sa taille avait diminué – ce qui lui donnait l’air, par sa tête située à une bien moindre hauteur qu’elle n’était autrefois, d’avoir ce qu’on appelle « un pied dans la tombe » – on aurait à peine pu dire qu’elle avait vieilli. Elle restait une Marie-Antoinette au nez autrichien, au regard délicieux, conservée, embaumée grâce à mille fards adorablement unis qui lui faisaient une figure lilas. Il flottait sur elle cette expression confuse et tendre d’être obligée de partir, de promettre tendrement de revenir, de s’esquiver discrètement, qui tenait à la foule des réunions d’élite où on l’attendait. Née presque sur les marches d’un trône, mariée trois fois, entretenue longtemps et richement par de grands banquiers, sans compter les mille fantaisies qu’elle s’était offertes, elle portait légèrement, comme ses yeux admirables et ronds, comme sa figure fardée et comme sa robe mauve, les souvenirs un peu embrouillés de ce passé innombrable. Comme elle passait devant moi en se sauvant « à l’anglaise », je la saluai. Elle me reconnut, elle me serra la main et fixa sur moi ses rondes prunelles mauves de l’air qui voulait dire : « Comme il y a longtemps que nous nous sommes vus, nous parlerons de cela une autre fois. » Elle me serrait la main avec force, ne se rappelant pas au juste si en voiture, un soir qu’elle me ramenait de chez la duchesse de Guermantes, il y avait eu ou non une passade entre nous. À tout hasard, elle sembla faire allusion à ce qui n’avait pas été, chose qui ne lui était pas difficile puisqu’elle prenait un air de tendresse pour une tarte aux fraises et revêtait, si elle était obligée de partir avant la fin de la musique, l’attitude désespérée d’un abandon qui toutefois ne serait pas définitif. Incertaine, d’ailleurs, sur la passade avec moi, son serrement furtif ne s’attarda pas et elle ne me dit pas un mot. Elle me regarda seulement comme j’ai dit, d’une façon qui signifiait « qu’il y a longtemps ! » et où repassaient ses maris, les hommes qui l’avaient entretenue, deux guerres, et ses yeux stellaires, semblables à une horloge astronomique taillée dans une opale, marquèrent successivement toutes ces heures solennelles d’un passé si lointain, qu’elle retrouvait à tout moment quand elle voulait vous dire un bonjour qui était toujours une excuse. Puis m’ayant quitté, elle se mit à trotter vers la porte pour qu’on ne se dérangeât pas pour elle, pour me montrer que, si elle n’avait pas causé avec moi, c’est qu’elle était pressée, pour rattraper la minute perdue à me serrer la main afin d’être exacte chez la reine d’Espagne qui devait goûter seule avec elle. Même, près de la porte, je crus qu’elle allait prendre le pas de course. Elle courait, en effet, à son tombeau. [ .. ] [MP, Recherche, Je pouvais quitter la bibliothèque et entrer dans les salons].

Las negritas son mías.

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RueMonceau,9septiembre, 15 octubre y 10 noviembre 2011. Fotos JPQ. Antiguo hotel particular de los Cattaui, extinta dinastía de banqueros egipcios.

Fotografía, París

Comments

  1. Teresa says

    noviembre 12, 2011 at 11:55 pm

    Sigue creciendo esta hermosa aventura suya.

    Responder
  2. JP Quiñonero says

    noviembre 13, 2011 at 8:55 am

    Teresa,

    Aventura solitaria,

    Q.-

    Responder
  3. Irene says

    noviembre 13, 2011 at 11:44 am

    Aventura solitaria que nosotros tenemos el gusto y la enorme satisfacción de seguir aquí… oye, esto no tiene precio !

    Responder
  4. JP Quiñonero says

    noviembre 13, 2011 at 12:13 pm

    Irene,

    Anda, anda. Compañía que se agradece, encantado, si,

    Q.-

    Responder
  5. Laura says

    noviembre 13, 2011 at 6:48 pm

    Pienso como Irene: estas cosas suyas me aportan muchas cosas que solo encuentro descubriendo esos mundos suyos.

    Responder
  6. JP Quiñonero says

    noviembre 13, 2011 at 9:21 pm

    Laura,

    Tu / vuestra generosidad siempre es un estímulo, grande,

    Q.-

    Responder
  7. José Julio Perlado says

    noviembre 14, 2011 at 7:28 am

    Juan Pedro,
    acompañándote un poco en lo que llamas tu “aventura solitaria”, esta vez con olores infantiles y olores familiares, caminos proustianos del París de ayer y de hoy que tú recorres tan bien…
    Admirables estas fotografías de la RueMonceau, decorados de vida y de novela…

    Responder
  8. JP Quiñonero says

    noviembre 14, 2011 at 7:48 am

    José Julio,

    Me meto debajo de la mesa, abrumado por tu inmensa generosidad,

    Q.-

    Responder

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