Siendo las industrias culturales españolas (estatales, autonómicas, nacionalistas, etc.) modestas sucursales provincianas de las industrias culturales francesas, el anuncio del “fin” y la “defunción” de la cultura francesa tiene su evidente alcance carpetovetónico.
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La edición europea de Time ha cruzado un “rubicón” simbólico, anunciando a bombo y platillo que “la patria de Proust, Monet, Piaf y Truffaut ha perdido su antiguo estatuto de superpotencia cultural”.
Tragicomedia nacional. Liberation ironiza con inquieto laconismo: La culture française est-elle vraiment morte? Le Monde publica una severa respuesta de Antoine Compagnon, profesor de Collège de France.
Cuando consiga liberarme de incendiarios, huelguistas y Nicolas Sarkozy publicaré mi opinión al respecto. De entrada, el color de mi punto de vista de fondo: la cultura francesa se me antoja víctima del Estado y sus mafias filantrópicas. Intentaré explicarme, quizá mañana.
Le Monde, 29 nov.07
Point de vue
Le déclin français vu des Etats-Unis
Antoine Compagnon
A mort de la culture française» : c’est le gros titre en couverture du dernier numéro de l’édition européenne du magazine Time (3 décembre 2007). L’édition américaine n’a pas jugé utile de reprendre l’article : son abstention confirme que, du point de vue de l’Entertainment Industry (Time Warner est aussi propriétaire d’AOL, de HBO et de CNN), la culture française est d’ores et déjà bien enterrée – décidément nulle et non avenue.
C’est une vieille rengaine. Il y a trois ans, la London Review of Books publiait deux articles tonitruants de Perry Anderson sur «La chute de la France» (les 2 et 23 septembre 2004). Le sociologue marxiste de UCLA rendait compte d’une pléthore de livres français sur notre déclin tous azimuts. On vivait alors une fin de règne. Après quelques mois d’observation, l’élection de Nicolas Sarkozy semble n’avoir rien changé. Car nous donnons des verges pour nous faire battre en cancanant sans relâche sur notre propre crépuscule. Comment les médias étrangers n’y seraient-ils pas sensibles ?
Don Morrison, le responsable de l’édition européenne de Time, a beau jeu d’énumérer les symptômes du mal culturel français : 727 nouveaux romans en librairie à la rentrée 2007, mais moins d’une douzaine traduits aux Etats-Unis chaque année ; près de 200 films par an produits dans l’Hexagone, mais près de 50 % des recettes du box-office pour le cinéma américain ; Paris déserté par la création musicale et par le marché de l’art (on se console comme on peut avec François Pinault propriétaire de Christie’s). Tout cela en dépit d’un budget de la culture disproportionné (1,5 % du PNB, contre 0,7 % en Allemagne, 0,5 % au Royaume-Uni, 0,3 % aux Etats-Unis). Bref, une culture sous perfusion, largement subventionnée par l’Etat, les régions ou les municipalités, mais sans échos hors des frontières.
Les causes de cet isolement sont rappelées : le français n’est plus que la douzième langue parlée au monde ; la culture d’Etat décourage les initiatives privées ; les subsides permettent à la création de vivoter à l’intérieur sans affronter le marché mondial ; le Nouveau Roman et la théorie littéraire ont stérilisé la fiction, si bien que les Français préfèrent lire des romans américains épiques.
Sans doute pourrait-on faire valoir que Paris est la destination préférée des touristes de tous les pays, les Etats-uniens en particulier, que le français reste la première langue étrangère enseignée aux Etats-Unis (car l’espagnol n’y est plus une langue étrangère), ou que Suite française, d’Irène Némirovsky, prix de la traduction de la French-American Foundation pour 2006 (je fais partie du jury), figure depuis de nombreuses semaines sur la liste des best-sellers du New York Times.
Trois des principaux événements musicaux de cet automne à New York n’ont-ils pas été offerts par Pierre Boulez, remplaçant Claudio Abbado à la direction de l’orchestre du Festival de Lucerne dans la Troisième Symphonie de Mahler à Carnegie Hall, par le pianiste Pierre-Laurent Aimard, dans Haydn, Mozart et Beethoven avec l’orchestre de chambre Mahler, et par Natalie Dessay, lors de sa première au Metropolitan Opera dans Lucia di Lammermoor ?
Mais la belle revanche d’Irène Némirovsky ne récompense pas la littérature vivante, et Boulez n’est plus un jeune homme. Aussi serait-il déraisonnable d’ignorer le verdict de nos amis états-uniens sur la panne de la culture française. Vus d’outre-Atlantique, après l’existentialisme et le structuralisme, après Malraux, Sartre et Camus, ou Barthes, Foucault et Derrida, les articles de Paris n’inspirent plus l’avant-garde intellectuelle. Moi-même, je lis le dernier Philip Roth, Pynchon ou DeLillo plus volontiers que la dernière autofiction germanopratine, facétie minimaliste, ou dictée post-naturaliste.
Il y a trois ans, nous donnâmes le prix de la French-American Foundation à la traductrice de Silbermann de Jacques de Lacretelle, mince mais fort récit de 1922 sur la découverte de l’antisémitisme par un lycéen, non pas faute d’autres traductions soigneuses, mais faute, parmi les traductions soumises au jury, d’oeuvres contemporaines substantielles.
Or le dilemme se répète quasi chaque année. Suivant Douglas Kennedy, cité par Time, tandis que «la fiction américaine traite de la condition américaine, les romanciers français font des choses intéressantes, mais ce qu’ils ne font pas, c’est de regarder la France».
Comme les règles du journalisme américain exigent toujours de «positiver», l’éditeur européen de Time nous remet quand même du baume au coeur en conclusion. Après tout, ne réalisons-nous pas quelquefois de bons films, comme les Taxi de Luc Besson, L’Auberge espagnole ou Amélie Poulain ?
Il se trouve que je les ai vus (c’est le genre de films auquels Air France expose les captifs de ses avions), mais ils ne me donnent pas de raisons particulières d’espérer. Plus sérieusement, en ayant fini avec le colonialisme (même si notre démon national nous a tentés tout récemment d’en vanter les bienfaits, avec la loi du 23 février 2005, abrogée ensuite), la France est devenue «un bazar multiethnique d’art, de musique et d’écriture des banlieues et des coins disparates du monde non blanc», ce qui en fait «un paradis pour les amateurs des cultures étrangères».
Que la culture française cesse donc de pleurnicher sur sa décadence pour se ressourcer dans ses marges, qu’elle s’ouvre sans état d’âme à la mondialisation, telle est la recommandation de Time. Adoptons la recette multiculturelle et nous serons sauvés. Attention quand même ! Comme métropole diasporique postmoderne, comme capitale-monde du XXIe siècle, Paris ne rivalisera pas avec New York, pas plus qu’à la Bourse ou dans les salles des ventes.
La sortie du déclin passe-t-elle par la refondation de l’école, la remise à la mode de la lecture, la réparation d’hiatus entre la littérature et le monde, l’introduction d’un enseignement artistique dans le secondaire, la concurrence des universités, ou la libéralisation des affaires culturelles, comme le prescrivent le président de la République et ses ministres de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la culture ? Peut-être, mais faisons surtout le pari, pour démentir tous les Perry Anderson et Don Morrison, que le roman de la France contemporaine est sous presse.
- Antoine Compagnon est professeur de littérature française au Collège de France.
PS. Mi versión sobre la defunción de las ideas muertas, en Francia y más allá: Mafias y destrucción de las culturas.
Así como yo soy el que hace la compra en mi casa, mi mujer es la que elige las películas que vemos el fin de semana. Yo sé lo que no tengo que comprar, y ella lo que no tiene que elegir (ni películas francesas ni argentinas).
Pero respecto a la portada de Time, una observación: ¿No parece ese anuncio de la muerte de la cultura francesa demasiado francés? ¿No era esa manía de echar las campanas a tocar a difuntos un vicio galo?
Gregorio,
Los americanos y los españoles siempre han tenido y tienen una idea MUY PEREGRINA de la cultura francesa. Y ahora (¿ahora? ¿hace cuantos años?) descubren que todo lo que habían adorado es pura basura. Quienes pensaban que Baudrillard era un “gran pensador” descubren que decía una cantidad importante de simpleces. Etc. En el terreno artístico, literario, las monstruosidades de los últimos treinta o cuarenta años han desembocado en la “defunción” actual.
Horror de horrores… en verdad, ¡¡¡siempre hubo otras culturas francesas…!!!! Obstinadamente silenciadas, en Barcelona, Madrid y Nueva York. Y esas otras culturas tienen una importancia de la más primera importancia. La “deconstrucción”, ¡cuantos cadáveres se cobró, para convertirse hoy en una momia maquillada con ideas muertas..!
Q.-
PS. La INTOXICACIÓN CULTURAL distribuida en las Españas y las Américas ha sido pavorosa. Y tiene ese costo un poco infantil e ignorante. Que no puede ocultar el DAÑO ATROZ DEL ESTADO Y LAS MAFIAS FILANTRÓPICAS (parisinas, catalanas, madrileñas, neoyorquinas) CONTRA LA GENUINA CULTURA FRANCESA. No sé si me explico.